Dolled-Up

2000

Image 1 Image 2 Image 3

Performance devenue triptyque vidéo, Dolled up est la première œuvre que Claudia Triozzi consacre aux métiers. L’artiste a elle-même travaillé à la chaîne en usine, lorsqu’elle avait entre 19 et 21 ans, avant de devenir danseuse puis chorégraphe. Dans Dolled up, elle part à la rencontre de métiers qui ont de moins en moins de visibilité en milieu urbain. Avec perspicacité et humour, elle confronte sa pratique de danseuse-chorégraphe à d’autres registres d’activités non moins précises et répétitives.

«Il y a l’idée de se glisser dans différentes activités, d’essayer de comprendre la logique performative du corps au travail : comment réaliser un travail qui peut être perçu de l’extérieur comme dur, répétitif, monotone ? Ce qui m’intéresse là-dedans, c’est le plaisir, la satisfaction de la précision du geste, de l’acte, et la possibilité d’en transmettre quelque chose».

Claudia Triozzi

Aussi semblait-il légitime que la question de l’emploi surgît un jour ou l’autre dans son travail. C’est chose faite avec la dernière création Dolled’up, initiée à Châtres, programmée au riche festival d’Ajaccio de danse contemporaine (Studio vidéo danse, du 19 au 24 mai) et bientôt prévue à Paris aux Inaccoutumées de la Ménagerie de Verre. L’espace scénique semblant poser la même question lancinante : « Qu’aurai-je fait de ma vie sans avoir suivi de hautes études (et si je n’étais pas devenue chorégraphe) ? »

Sur les vidéos accompagnées d’un diaporama figurent les différents apprentissages auxquels la chorégraphe s’est livrée le plus sérieusement du monde auprès des commerçants de la ville du Berry. Claudia boulangère, Claudia couturière, Claudia caissière… Elle ne joue cependant pas à un jeu de rôle qui serait instructif mais guère impliquant. A travers tous les scénarios de vie possibles, apparaît non seulement une anthropologie du quotidien vécu sous l’angle de multiples aliénations ­ confortables ou épouvantables ­, mais aussi une mise en scène tragi-comique de l’incapacité chronique d’un individu, en dépit de la meilleure volonté, à se fondre dans le moule des figures sociales telles qu’on peut les imaginer dans les projections glorieuses de l’enfance (« I try, and I try », déplore-t-elle).

Pour ce faire, Claudia Triozzi a de nouveau conçu une machinerie savante. En contrepoint aux images, sur une table percée d’un rectangle rempli de caramel fondant, surmontée d’un réseau mécanique d’objets fétiches et fictifs, la danseuse s’adonne à un étrange cérémonial à base d’hosties, de partie de ping-pong et de casques de Gaulois. De cet étrange rébus surgit un sentiment mêlé de fascination, de tristesse et de drôlerie, le sentiment d’une place problématique à trouver dans le monde, mais une place essentielle, désormais occupée par Claudia Triozzi dans la danse contemporaine.


Hugues Ghenassia

Conception et interprétation: Claudia Triozzi Vidéos: Isabelle Griot Photographies : Olivier Charlot & Claudia Triozzi Lumières: Caty Olive Coproduction: la Ménagerie de verre, les laboratoires d’Auberviliers
2002 Festival international de dança contemporânea (Dançasnacidade), Lisbonne « Big Social Game », Turin, 19 avril au 19 mai 2001 Biennale de Lyon Connivence, Musée d’Art contemporain, Lyon I ’ll never let you go – Choreography Visuals Thought, Stockholm 2000 Centre Pompidou, Paris Ménagerie de Verre, Paris Espace Pasolini, Valenciennes Festival Nouvelles Scènes, Dijon Les Laboratoires d ’Aubervilliers Centre Arteleku, San Sebastian Résidence de création à la Châtre Isadora Danse